Qu’ont en commun un interprète, greffier, œnologue, coach, avocat, conférencier, psychologue, commissaire-priseur, notaire, professeur de piano ? Rien ? Eh bien si ! Un même statut, celui de profession libérale. L’actualité récente nous a rappelé que personne n’est pas à l’abri d’une maladie qui nécessite un arrêt de travail ou une hospitalisation. Sans oublier les suites une fois sorti d’affaire : le repos, la rééducation et l’aide à domicile, si besoin. Dans ce contexte, il est utile de se poser en amont la seule bonne question : comment maintenir son niveau de vie si l’on n’est plus capable d’exercer sa profession, même partiellement et temporairement ? Sans jouer les Cassandre, il vaut toujours mieux prévenir que guérir… Point sur la protection sociale des professions libérales en cas d’arrêt de travail.

 

Les professions libérales exercent une activité qui n’est ni commerciale, ni artisanale, ni industrielle, ni même agricole. Leurs membres pratiquent en toute indépend ance une science ou un art dont l’activité intellectuelle joue le principal rôle. Beaucoup de professions libérales relèvent depuis janvier 2020 de la Sécurité sociale pour les indépendants, gérée par le Régime général de Sécurité sociale (Assurance maladie, Assurance retraite, Urssaf) en remplacement du RSI. Mais certaines professions ont leur propre régime obligatoire. C’est le cas entre autres des médecins, des vétérinaires, des agents généraux d’assurance ou encore des auxiliaires médicaux. Les autres sont rattachés à la caisse interprofessionnelle de prévoyance et d’assurance vieillesse (CIPAV) qui est assez généraliste. Elle rassemble par exemple les architectes,  géomètres, guides de haute montagne et diététiciens.

Régime obligatoire et prévoyance complémentaire

Avant de se pencher sur votre prévoyance, il est déterminant de connaître la caisse à laquelle vous êtes rattaché car chacune apporte des garanties différentes en d’incapacité, d’invalidité ou de décès. Mais en tout état de cause, quel que soit votre régime obligatoire, vos garanties resteront toujours très inférieures à votre revenu lorsque vous pouviez encore travailler. Un manque à gagner assez conséquent surtout quand l’on sait que les charges de votre structure continuent de « courir » (loyer, eau, électricité, Urssaf). Des charges qui sont assurables dans le cadre d’un contrat de prévoyance avec l’option « frais généraux » ou même en dehors d’un contrat de prévoyance.

Deux cas concrets pour vous éclairer : tout d’abord un avocat qui gagne 6950 € brut par mois soit 83400 € bruts annuels. Il cotise à la Caisse nationale des barreaux français et à la prévoyance des avocats (CNBF-LPA). S’il se trouve dans l’impossibilité totale d’exercer sa profession, temporairement ou définitivement, il peut bénéficier de prestations journalières, puis d’une pension d’invalidité et d’un capital décès. Sa famille pourra aussi percevoir une allocation aux orphelins (rente éducation versée à chacun de ses enfants à charge, âgés de moins de 25 ans, en cas de poursuite d’études, à la date de son décès). De même, une rente de conjoint. Sachant que la prévoyance est calculée sur le montant net de son revenu (généralement 60%), il touche un revenu net annuel de 50.040 €. Les 33690 € restant correspondent à ses frais généraux. Le gain journalier déclaré se monte à 137,10 €. Pour l’atteindre, son régime obligatoire (CNBF) lui versera 61 € à partir du 2ème mois d’arrêt. En effet, en cas d’arrêt de travail pour maladie ou accident, il existe une franchise d’un mois. En revanche, il ne touchera rien pour régler ses frais généraux.

Assurance des frais généraux

S’il souhaite toucher une indemnité journalière pour couvrir ses dépenses courantes ou professionnelles liées au fonctionnement du cabinet  pendant son arrêt de travail, notre avocat devra opter pour un régime complémentaire de couverture à titre individuel pour l’aider à couvrir la différence de 76,10 € par jour. Ces garanties, qu’il financera tout seul, pourront s’inscrire dans le cadre de la Loi Madelin afin de profiter d’avantages fiscaux puisqu’il est travailleur non salarié. Sous certaines conditions et limites, il aura ainsi la possibilité de déduire de son bénéfice imposable les cotisations versées pour acquérir ces garanties « Madelin ». Ces frais généraux seront couverts  pendant une année puisque passé ce délai, il y a de grandes chances qu’il réexamine son activité et la répartition de ses charges. A l’issue de 3 années d’arrêt maladie, l’assuré sera mis en invalidité. La contribution du régime obligatoire baissera alors à 47,69 € et la part payée par son contrat de prévoyance, s’il en a souscrit un, devra augmenter en proportion pour maintenir le même niveau d’indemnisation. A noter que les cotisations sur le contrat de prévoyance et celles des frais généraux  ne sont pas soumises à la même fiscalité.

Deuxième cas de figure, celui d’un  géomètre expert au revenu net imposable de 34 000 € annuels ce qui correspond à un gain journalier de 95,89 €. Il cotise à la Cipav et ne touche aucune indemnité journalière en cas d’arrêt de travail pendant les trois premières années car ses cotisations sont très peu élevées pour l’incapacité, l’invalidité ou le décès. Ce n’est qu’une fois déclaré en invalidité que son régime obligatoire lui verse 14,61 € par jour. Pour lui, la question ne se pose pas : il doit absolument souscrire un contrat de prévoyance pour faire face à ses dépenses quotidiennes et à ses frais généraux en cas d’arrêt maladie.